2017 - 2020
Cover up those words, which I can’t endure to look on.
Words of surrender whispered by lovers in Einstein on the Beach, words of expectations
inspiring Tagore in view of / confronted with childlike innocence (On the Seashore), words of
prophecy in the Apocalypse, those flashing words became almost unbearable and illegible
while collective memory, transcendence of values, conservation and creation instincts are
threatened to vanish.
Covering them of black, Tania Mouraud paradoxically reveals their greatness and provides
them the power of pure signs in a new series of works she made with body paint on sheet
metal, based on the game of word search. Seemingly trivial and innocuous, played in every
language, this game relates the meaning’s intelligibility to the sign’s visibility, summoning up
player’s mnemonic skills and deciphering’s abilities. The grids randomly created by the artist
from the texts she selected work like the weft of a riddle, which is the riddle of History and
human destiny struck by destruction, oblivion and ill-fated repetition. Extending her research
about language and meaning’s perversion which she started with the painted series Writings,
T. Mouraud dialectically shows the aphoretical power of texts selected among the poetry’s
masterpieces. Every last of the Mots mêlés works like plastic “agalmas” and is reminding us
that to exist, the language of love and truth can only come to light behind the veil of
appearance and the multitude of semblance.
Mots d’abandon que se murmurent les amants d’Einstein on The Beach, mots d’espérance de Tagore devant
l’innocence enfantine (On The Seashore),
mots de prophétie de l’Apocalypse,
ces mots que leur fulgurance a rendus inaudibles et illisibles à l’homme quand
menacent de disparaître la mémoire collective, la transcendance des valeurs,
l’instinct de création et de conservation. En les couvrant de noir, Tania
Mouraud les révèle paradoxalement dans leur magnificence et les porte à la
puissance de signes plastiques purs dans une série d’œuvres peintes sur des
carrosseries en aluminium industriel, inspirée par le jeu des mots-mêlés. Ce jeu
d’apparence banale et anodine pratiqué dans toutes les langues relie
l’intelligibilité du sens à la visualité du signe, faisant appel autant aux
qualités mnémotechniques qu’à la capacité de déchiffrement du joueur. Les
grilles aléatoirement générées à partir des textes choisis par Tania Mouraud
constituent ainsi la trame d’une énigme à percer, l’énigme du destin humain et
de l’Histoire, frappés par la destruction, l’oubli et la répétition tragique. Prolongeant
ses recherches sur le langage et le pervertissement du sens engagé dans la série
des Écritures, Tania Mouraud révèle dialectiquement
la puissance aphorétique de textes puisés dans les chefs d’œuvre de la poésie. Les
Mots-mêlés fonctionnent ainsi comme
autant d’agalmas auxquels l’artiste donne une forme plastique, et nous rappelle
que, pour exister, le langage de l’amour et de la vérité ne peut se révéler que
sous le voile de l’apparence et la multitude du semblant.
Matthias BARTHEL
Tania Mouraud's Mots-Mêlés uses the
overbearing sign as a game. If Dreams placed us before words that have
become images, Mots-Mêlés plays with our understanding by using what can
be rightly called today’s sole universal language, that of computer
programming - a code borne by mathematics, what philosophy holds as our
proximate access to the intelligible realm, to Ideas.
No readable sign.
The
message has now completed its metamorphosis and the title already tells
us everything ; excerpts from the great texts, translated through the
prism of an imagination far from our idioms, are now black flat tints,
lines, crossings, that no one can read.
Mots-Mêlés set us free, they
do not speak at first sight, in this lexicon that belongs to everyone
and no one at the same time, and where misunderstanding does not exist.
When our eyes do not know anymore, our hearts are the only remaining way to read.
Les Mots-Mêlés de Tania Mouraud font de l’arbitraire du signe un jeu.
Si les Dreams nous posaient face à une phrase iconique devenue image, les Mots-Mêlés se jouent de notre compréhension et usent du seul code aujourd’hui universel, soit la programmation informatique ; un code porté par les mathématiques, que la philosophie tient comme notre accès le plus immédiat à l’intelligible, aux Idées, et, oserait-on le dire, à un absolu du terme.
Aucun signe reconnaissable.
Le langage a parachevé sa mue, le titre nous dit déjà tout ; les extraits des grands-textes, se donnant dans une traduction imaginaire à des lieues de nos idiomes, sont désormais des aplats noirs, des lignes, des croisements, que nul·le ne peut lire.
Les Mots-Mêlés nous laissent libres, ils ne se disent pas de prime abord, dans cette langue de tous et de personne où le malentendu n’existe pas.
L’oeil ne sait plus, reste l’entendement du coeur.
Cécile RENOULT